17 octobre 2006

Hommes de bien ...

Quelques nuits d’hagiographie …
Le 12 octobre, c’était le “Columbus day”, un jour de fête pour ceux qui se réjouissent que Christophe Colomb ait atteint les côtes du “Nouveau monde”, un jour de protestation pour les autres. Et notamment pour les Amérindiens. En région parisienne, cette nuit-là, ce sont surtout les Amérindiens et ceux qui les défendent qui se sont fait entendre. Leur plus célèbre porte-parole, John Trudell, était en effet le sujet d’un documentaire dont l’avant-première était organisée au cinéma de Pantin. Un long portrait, élogieux, presque une hagiographie de celui qui a été le représentant de la frange la plus militante des Amérindiens et est devenu un poète / chanteur saisissant après avoir perdu sa femme et ses enfants dans la bataille. Un fascinant voyage vers l’intériorité d’un homme, rythmé par ses mots graves et tendres.
Le 15 octobre, c’était le dix-neuvième anniversaire de l’assassinat de Thomas Sankara. Trois documentaires projetés dans une salle associative du quatorzième arrondissement lui rendaient hommage. Là encore, l’hagiographie n’était pas loin. Mais, après tout, notre époque a bien le droit d’avoir ses modèles et rien ne nous oblige à les choisir sur un terrain de football ou sur un plateau de télévision. Thomas Sankara, le capitaine qui tenta de lutter contre la fatalité au Burkina Faso entre 1984 et 1987, était donc – n’en déplaise à ceux qui croient que cela n’existe pas, que l’être humain est trop faible pour cela – un héros, une sorte de saint laïc.
Quel rapport avec la musique (puisque c’est de cela qu’il s’agit d’ordinaire ici) ? Dans le désordre : … Sankara était musicien. Quelques photos le montrent une guitare à la main (même si personne ne dit qu’il en jouait bien) … C’est le grand Ray Lema qui a composé la bande-originale de l’un des documentaires … Dans un autre, Sankara, à la tribune de l’ONU, citait les musiciens parmi les « artistes – poètes, peintres, sculpteurs, musiciens, acteurs – hommes de bien qui voient leur art se prostituer » … Le troisième documentaire s’achevait par l’image de Karim, l’extraordinaire spécialiste du reggae sur Ouaga FM, qui, en direct, rendait hommage sur un dub apaisé au père de Thomas Sankara, décédé l’été dernier …
Trève d’hypocrisie : Thomas Sankara me fascine (comme d'autres "hommes de bien" : Karim, François-Xavier Verschave dont je lis actuellement "L'homme qui voulait soulever les montagnes, ...) parce qu'il me pousse à être meilleur, pas pour ses liens avec les musiciens. D’ailleurs, j’aurais pu parler de ses liens avec les Amérindiens, dont il disait à la tribune de l’ONU « Je souffre au nom des Indiens massacrés, écrasés, humiliés et confinés depuis des siècles dans des réserves, afin qu’ils n’aspirent à aucun droit et que leur culture ne puisse s’enrichir en convolant en noces heureuses au contact d’autres cultures, y compris celle de l’envahisseur. » Et pourtant il ne connaissait pas John Trudell ! Qu'est-ce que cela aurait été s'ils avaient eu le temps de se rencontrer ...

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