29 juin 2006

Magic : le poids de la pop, le choc des chansons …

J’ai rencontré lundi matin un représentant de Magic, la « revue pop moderne ».
Je lis donc depuis une dizaine de jours divers numéros de ce magazine, celui que j’avais acheté avant notre rencontre et ceux qu’il m’a offerts. C’est une découverte parce que je ne suis pas un familier de cet univers (la pop n’est pas mon principal centre d’intérêt, demandez à mon libraire). Et c’est une découverte agréable : le magazine s’avère l’œuvre de véritables passionnés, érudits et intraitables, et le graphisme est séduisant.
J’ai été surpris par leur façon quasiment obsessionnelle de présenter les chansons une à une dans leurs chroniques de disques. D’ordinaire, les chroniques de disques des univers musicaux que je fréquente sont plus abstraites, il s’agit plus du portrait impressionniste d’un artiste que d’une analyse fouillée de son travail.
J’ai d’abord cru que ce découpage titre par titre découlait d’une envie d’être concret.
Mais cette très minime différence de style cache probablement tout autre chose : une véritable différence de genre. J’essaie d’expliquer mon intuition …
La pop est un genre bien défini. Elle est liée à la globalisation soudaine des musiques populaires anglo-saxonnes dans les années 60. Elle a acquis ses lettres de noblesse avec les Beatles et les Kinks et elle se perpétue depuis sans peine. Apparentée au rock, elle s’en distingue par une plus grande finesse d’écriture. Au fond, la grande affaire de la pop, c’est la chanson. L’artiste pop compte peu par lui-même. Il a généralement la même biographie que l’artiste pop qui l’a précédé ou que l’artiste pop qui lui succèdera : il a grandi au sein d’une communauté blanche et anglo-saxonne, il a écouté les Beatles avec ses parents, a monté un groupe avec des copains de lycée et rêve de faire la couverture du NME (ou de Wire s’il est avant-gardiste, voire de Magic s’il est francophile). Pour lui comme pour ceux qui l’écoutent, la chanson passe avant tout. Elle est un exercice de style avec figures imposées (brièveté, usage de l’anglais, …). D’où la précision des journalistes de Magic qui vont dénicher au fond de chaque album les deux ou trois exercices de style les plus éblouissants.
A l’inverse, dans d’autres univers musicaux, l’album se reçoit plus facilement comme un tout. C’est alors l’artiste qui est la grande affaire. Il est d’ailleurs souvent un genre musical à lui tout seul. Si Snow Patrol, Midlake ou Belle & Sebastian font de la pop, Oliver Mtukudzi fait du Oliver Mtukudzi, Juan Luis Guerra fait du Juan Luis Guerra, … Et écouter les disques de géants tels que Mtukudzi ou Guerra (pour ne donner que deux exemples) consiste moins à rechercher la chanson parfaite (qui, de toutes façons, n’existe pas, même pas pour son auteur) qu’à prendre des nouvelles de grands témoins aux vies bien pleines.
Cela me semble moins vain … mais ce n’est que l’opinion d’un homme qui écoute trop peu de pop.
Je retourne lire Magic pour étayer un peu une argumentation qui me semble bancale ...

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Je passe vite sur le journal - j'ai été abonné un temps, et je regarde -ai regardé, plutôt, je suis passé à autre chose- avec amusement les diverses évolutions, compromissions, et autres choix thématiques. Je le place à un niveau plus intéressant que les Inrocks-hebdo (v1 ou v2), mais bon, ce n'est pas difficile, depuis de très nombreuses années.

Je suis d'accord avec ton origine, beaucoup moins avec ta définition et ton explication. La pop est... populaire, il y a un côté catchy, instantanné, qui n'a pas forcément lien avec la guitare, si j'ose dire. 'Maxinquaye' est l'album pop de Tricky. Beirut, que j'adore, fait définitivement de la pop sur 'Gulag Orkestrar", alors que c'est un jeune américain qui se réapproprie la musique d'une certaine Europe de l'Est.

Là où tu dis des "énaaaaaurmités", c'est que la pop n'est pas qu'une affaire de chanson. L'artiste compte énormément, tu penses! Que serait Pulp sans Jarvis Cocker ? (rien, la preuve) Neil Hannon pour Divine Comedy? Que serait Pizzicato Five, s'il n'y avait pas Yasuharu Konishi, le maître à penser et créer, et Maki Nomiya, la chanteuse égérie, pour concrétiser? Peut-on dissocier Momus de Nick Currie? Et malgré le côté 'invadable/cauchemard marketing' du dernier Scott Walker, "The Drift", cela reste de la pop...
Les exemples seraient à multiplier.

Les artistes (solos ou non) forts font leur propres univers, si forts qu'ils en deviennent des nouveaux étalons de comparaison, ou de référence, qu'on reconnaît entre mille très très rapidement. Belle & Sebastian, même si le son a évolué, Dead Can Dance, Kraftwerk, Bertrand Burgalat, et je passe sur des gens oubliés ou moins connus...

J'ai énormément de mal à mettre une définition de la pop d'un point de vue musical/mélodique précis. Ce serait plutôt un certain état d'esprit qui peut influencer un environnement/ contexte instrumental. Pop + rock, pop + samples, pop + jazz, pop + électronique (et électro, et électronica, et...), pop+rap (The Streets) Et effectivement, plutôt une mentalité anglosaxonne, sans empêcher ceci dit d'autres nationalités ni d'autres langues de faire des chansons pop. (et que dire de la géographie britannique, un groupe de Londres ne fera pas la même musique qu'un groupe de Liverpool, et un groupe de Camden (Londres!) pas la même chose qu'un groupe de Brixton (Londres!))

Quant à l'aspect bref, certaines chansons pop prennent encore plus d'éclat dans le contexte d'un album ("Wake Up!" des Boo Radleys, "Coming Up" de Suede, par ex).

Un côté passionnel, peut-être. Encore que.

Qu'est-ce qui n'est pas pop, alors? J'ai autant de mal à définir le non-pop que la pop! :)